Origine de la lune et des étoiles

conte philippin

Jadis, le ciel était très bas. Il n'y avait ni lune ni étoiles. Le ciel était presque collé au toit des maisons, très basses elles aussi. Alors, une mère et sa fille vivaient à la campagne. La mère était déjà vieille, mais encore costaude, elle labourait, plantait riz et légumes, pour avoir de quoi manger. Elle cuisinait, desservait, etc. Sa fille unique, Maria, l'aidait rarement. Sa mère ne la grondait pas. C'était son unique enfant. En dépit de la pauvreté du ménage, Maria se comportait en gosse de riche. Dès le réveil, elle s'habillait et se peignait. Ensuite, elle s'asseyait à sa fenêtre, contemplait le village alentour. C'est seulement quand sa mère l'appelait pour le repas, qu'elle sortait pour manger.

À la campagne, il y a beaucoup à faire pour un enfant, s'il veut vraiment travailler : balayer la cour, nourrir et abreuver les poulets, ramasser les poussins tombés du nid, vanner le riz, le faire sécher au soleil, piler le riz pour le faire cuire ensuite, soigner les légumes... Mais elle n'apprit rien de tout cela, la Maria. Après le petit-déjeuner, ce qu'elle faisait, c'était de prendre le peigne de sa mère, et de se coiffer. Peigne en or, incrusté de diverses pierres scintillantes. Alors, elle nageait dans le bonheur. Elle aimait aussi beaucoup se servir du collier de sa mère. Quand elle l'enfilait à son cou, elle en comptait les perles. Le peigne et le collier, voilà les jouets qui occupaient Maria toute la sainte journée, tandis que sa mère trimait. Celle-ci lui dit un jour :

— Maria, je sors chercher le buffle. Je serai sans doute longue à rentrer. Pile un peu de riz, car nous n'avons rien pour le dîner.

— Rentre vite ! dit Maria.

— Oui dès que j'aurai le buffle, je rentrerai.

Quand sa mère fut partie, Maria se dit : " Il est encore tôt. Je pilerai le riz tout à l'heure. D'abord, je me peigne ! "

Elle s'assit au pied de l'échelle. La voilà qui se peigne, se peigne. Après de longues heures de peignage, elle se dit : " Il est encore tôt, je pilerai le riz tout à l'heure. D'abord, je vais jouer avec le collier. " Elle prit le collier, le mit à son cou. Et de palper les perles, et de les palper, tout en les comptant.

Tandis qu'elle passait ainsi le temps, elle leva les yeux en l'air, vit qu’il faisait sombre. Peu après arriva sa mère traînant le buffle :

— As-tu cuit le riz? demanda-t-elle.

— Point encore.

— L'as-tu pilé ?

— Point encore.

— Ah cette enfant ! Je crève de faim. Et rien de cuit ! Viens donc m'aider à piler !.

Maria sortit dans la cour, et suspendit au ciel le peigne et le collier puis, elle prit le pilon. Les deux femmes se mirent à piler.

— Pile plus vite ! dit la mère non sans irritation. Je suis affamée après cette course au buffle. Il faut encore cuire le riz.

Les deux femmes précipitèrent la cadence du pilonnage. Chaque fois qu'il était en l'air, le pilon heurtait le ciel. Elles n'y prêtaient pas attention. Elles voulaient en finir, pour cuire le riz. Au bout d'un certain temps de pilonnage, elles notèrent que le pilon ne heurtait plus le ciel. Chaque fois que le pilon était en l'air, et heurtait le ciel, celui-ci s'était exhaussé, avec le peigne et le collier y accrochés.

Un soir, Maria était à sa fenêtre, contemplant le ciel : elle voyait son peigne briller là-haut, ainsi que les perles du collier, éparpillées là-haut, lumineuses. On dit que ce peigne, c'est la lune, et que les perles du collier, ce sont les étoiles.